mercredi 24 décembre 2008
*CLIMAT : 2008, une mauvaise année météorologique***
***L'année qui s'achève se classe au 10e rang des années les plus chaudes depuis 1850, selon le bilan intérimaire rendu public cette semaine par l'Organisation météorologique mondiale (OMM). La liste des catastrophes et des phénomènes climatiques exceptionnels est longue.
La fonte de la banquise arctique a atteint son pic le 14 septembre 2008. Cette fonte est la deuxième en importance jamais observée par satellite depuis 1979. En 2008, la banquise ne couvrait plus que 4,6 millions de kilomètres carrés, contre 4,3 millions en 2006, l'année record pour la plus petite surface jamais observée. La banquise perd en moyenne 74 000 km2 par an depuis trente ans. Ces données ont été au centre des débats lors du récent congrès de l'American Geophysical Union (AGU) en raison du phénomène de l'"amplification arctique", qui retient de plus en plus l'attention des chercheurs car le cercle vicieux qui en résulte pourrait faire perdre à l'humanité le contrôle du climat.
Plus la surface libre de glace augmente dans les mers arctiques, plus elles absorbent le rayonnement solaire, ce qui augmente les températures régionales et accélère le dégel du permafrost, dans lequel dorment des milliards de tonnes de méthane, un des plus puissants gaz à effet de serre. Le réchauffement des océans arctiques semble aussi en voie de libérer une partie des milliards de tonnes d'hydrates de méthane – les clathrates – qui reposent solidifiées sur le fond de l'océan. Des équipes de chercheurs qui ont voulu mesurer, l'été dernier, la libération de méthane dans les mers voisines de la Sibérie parlent de taux 100 à 200 fois supérieurs aux niveaux naturels.
Pour l'Organisation météorologique mondiale (OMM), le plus inquiétant réside cependant dans la "disparition spectaculaire d'une partie importante – près de 25 % – des plates-formes de glace géantes qui bordent l'île d'Ellesmere. D'une épaisseur de 70 mètres, ces plateaux glaciaires couvraient, il y a un siècle, 9 000 km2, dont il ne reste aujourd'hui qu'à peine 1 000 km2". Ces glaces "historiques" vont être désormais remplacées par des glaces annuelles, de quelques mètres d'épaisseur. Au congrès de l'AGU, d'autres chercheurs ont fait état de liens nouveaux entre la réduction des glaces arctiques et la fonte de l'inlandsis, la calotte de glace de près de 2 kilomètres qui couvre le Groenland. La période de fonte estivale, qui dure habituellement de dix à quinze jours, s'est étendue cet été sur trente-cinq jours, du jamais-vu. La perte de volume de l'inlandsis aurait été trois fois plus importante cet été qu'en 2007.
Mais ces tendances de fond coïncident avec d'importantes disparités régionales ailleurs sur la planète. Les températures ont été en effet supérieures à la moyenne dans toute l'Europe. Dans les pays nordiques, l'hiver n'a jamais été aussi doux, alors qu'il s'est avéré un des plus rigoureux dans une grande partie de l'Eurasie, particulièrement en Turquie et en Chine. L'hiver dernier a été particulièrement sévère en Chine, recouvrant de neige 1,3 million de kilomètres carrés dans 15 provinces méridionales.
Pendant que l'Argentine et une bonne partie des régions méridionales de l'Amérique du Sud connaissaient des minima record, en Australie du Sud, les maxima au-dessus de 35 °C ont perduré plus de quinze jours. L'importante sécheresse que connaît cette région a donc vu ses effets s'amplifier en 2008. A la fin juillet, la majeure partie du sud-est de l'Amérique du Nord a connu une sécheresse de "modérée à exceptionnelle", selon l'OMM. Cette sécheresse a aussi touché le nord et le centre de la Californie, aux prises avec des incendies difficiles à réprimer. Au Canada, le sud de la Colombie-Britannique a connu sa cinquième plus longue sécheresse depuis soixante et un ans.
Le rapport de l'OMM fait par ailleurs état des chutes de neige exceptionnelles qu'a connues le Québec, avec un record absolu de 550 cm dans la vieille capitale, sans doute pour immortaliser son 400e anniversaire, avec ses maisons englouties et, il faut le dire, quatre morts pour cause d'effondrements. Le rapport note aussi que l'hiver torontois est le troisième en enneigement des soixante-dix dernières années. Quant à l'Ile-du-Prince-Edouard, elle a subi fin janvier une de ses pires tempêtes de glace des dernières décennies, qui a privé d'électricité 95 % de sa population pendant quelques jours.
Les inondations ont été nombreuses et souvent fatales sur la planète, particulièrement en Afrique, y compris dans la partie subsaharienne, et dans l'est de l'Australie, en Inde, au Pakistan et au Vietnam. En Inde, ces inondations ont déplacé 10 millions de personnes. Les cyclones ont aussi été abondants, et celui qui a frappé l'océan Indien et le Myanmar en mai, Nargis, a fait près de 78 000 victimes. L'Atlantique a connu seize tempêtes tropicales, dont huit sont devenues des ouragans particulièrement dommageables dans les Caraïbes, en Amérique centrale et aux Etats-Unis.
Louis-Gilles Francoeur
Le Devoir
Courrier International
24 décembre 2008
*Photo : camp de base des chercheurs de l'Université d'Alberta, situé au centre de l'île d'Ellesmere
DR
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