lundi 11 janvier 2010
*Et si la taxe carbone était européenne ?*
***Le 30 décembre, le Conseil constitutionnel a retoqué la taxe carbone voulue par Nicolas Sarkozy. Trop d'exemptions, trop d'inégalités aussi. Tant qu'à revoir la copie, autant reprendre le problème par le menu. Terra eco a sondé plusieurs économistes et vous propose trois scénarios, sur le chemin d'une taxe carbone idéale.
Les plus :
Une taxe carbone en France, c’est bien. Sauf que les émissions ne rebroussent pas chemin aux frontières de l’Hexagone. Alors une taxe franco-française "c’est un peu comme de cracher en l’air", estime Rémy Prud’homme, ex-professeur d’économie à l’université Paris XII. Mal compensée, celle-ci risquerait même de rendre les entreprises de l’Hexagone moins compétitives que leurs rivales. "Idéalement, il faudrait une taxe carbone mondiale", rêve Emmanuel Combet, doctorant au Centre international de recherche sur l’Environnement et le développement (Cired). Mais difficile de faire peser identiquement le poids carbone sur les épaules d’un Américain et d’un Bangladeshi. Limitons-nous donc au carré bruxellois. C’est l’idée défendue par la Suède, elle-même dotée d’une dîme carbone nationale.
Et pourquoi ne pas supprimer carrément le marché d’échange de quotas européen ? Car la coexistence des deux systèmes - quotas pour les entreprises très émettrices, taxe carbone pour les autres – risque de poser des problèmes. D’équité notamment : dans un cas le prix du carbone dépend des aléas du marché, dans l’autre, il est fixe pour une année donnée. Ainsi, une PME devrait s’affranchir d’une tonne de CO2 à 17 euros tandis que son voisin pétrolier profiterait d’un taux du marché à 9 euros ! Le 6 janvier, Michel Rocard a résolu d’un coup l’équation dans les colonnes des Échos : "Il faut supprimer le marché des quotas de CO2 au profit d’une taxe carbone européenne", a-t-il expliqué en substance.
Les moins :
Imposer une taxe à l’échelle européenne, ce n’est pas tout à fait de la tarte. “En matière de fiscalité, il faut l’unanimité des pays membres de l’UE”, rappelle Emmanuel Combet. Quant à supprimer le marché des quotas, l’idée de fait pas sauter les économistes de joie. "Il a fallu un effort considérable pour le mettre en place. Ce n’est pas une décision à prendre à la légère. Et dans tous les cas, la France ne pourrait pas en décider unilatéralement", martèle pour sa part Patrick Criqui, directeur du Laboratoire d’économie de la production et de l’intégration internationale de Grenoble (Lepii) "Le système des quotas a l’avantage de la souplesse, souligne pour sa part Rémy Prud’homme. Il permet de prendre en compte la situation de certaines entreprises très dépendantes en carbone, comme les cimenteries." Plus simplement, il a le mérite d’exister tandis que la taxe carbone peine à s’installer. "On pourrait au contraire étendre le système des quotas négociables à toutes les entreprises", ose même Rémy Prud’homme en prenant le problème à rebrousse poil.
La solution ?
Ronger son frein. "Une taxe carbone européenne risque d’être très longue à mettre en place. Or, si l’on en croit les travaux du Giec, il y a urgence à agir. Nous ne pouvons pas faire l’économie d’un système parce qu’il n’est pas parfait", souligne Emmanuel Combet qui préconise un système mixte : taxe carbone française, marché des quotas européens. En attendant mieux...
KARINE LE LOËT
Terraeco
11-01-2010
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