***New Delhi devrait bouger. Au centre de l'attention internationale après les récents gestes des Etats-Unis et surtout de la Chine, l'Inde pourrait à son tour annoncer des objectifs chiffrés de limitation de ses émissions de gaz à effet de serre afin de préserver les chances d'un accord au sommet mondial de Copenhague.
Le ministre indien de l'environnement et des forêts, Jairam Ramesh, l'a laissé entendre, vendredi 27 novembre, lors d'une visite à Pékin, où il s'est efforcé de mettre au point une approche concertée avec la Chine. "Nous ne pouvons pas ignorer le fait que la Chine, l'Indonésie, le Brésil ont affiché des (…) objectifs chiffrés", a déclaré M. Ramesh, ajoutant : "Cela a des implications pour nous." Assistant, vendredi, au sommet du Commonwealth à Trinité-et-Tobago (Caraïbes) largement consacré à la question du climat, Nicolas Sarkozy a indiqué lui aussi que l'Inde devrait bientôt "mettre des chiffres sur la table". Au terme d'un entretien avec le premier ministre indien Manmohan Singh, présent à Trinité-et-Tobago, M. Sarkozy s'est voulu optimiste: "M. Singh m'a dit que jamais l'Inde ne produirait plus de carbone que les autres pays. Il m'a dit que jamais l'Inde ne serait un obstacle à un accord à Copenhague."
La récente annonce chinoise a incontestablement renforcé la pression sur New Delhi, jusqu'à présent arc-boutée sur son refus de tout engagement international au nom de la responsabilité historique des pays industrialisés dans le réchauffement climatique. "Nous devons rechercher la flexibilité", a confirmé M. Ramesh. Le ministre fait partie du camp des "pragmatiques" au sein du gouvernement indien. Quitte à essuyer la bronca des partisans de l'orthodoxie indienne, il a maintes fois mis en garde contre le risque de voir "l'Inde isolée à Copenhague". Le resserrement en cours des relations indo-américaines, confirmé par la récente visite d'Etat de M. Singh à Washington, a élargi la marge de manœuvre de ce courant.
Pour autant, le geste que pourrait consentir New Delhi ne sera sûrement pas à la hauteur des attentes des pays industrialisés. "Une réduction des émissions en termes absolus" demeure "exclue", a précisé M. Ramesh à Pékin. L'Inde devrait calibrer son initiative sur celle de la Chine, à savoir s'engager exclusivement sur une réduction de l'intensité carbone de son activité économique (moindre émission de CO2 pour chaque point de croissance généré). M. Ramesh n'a encore affiché aucun chiffre mais, selon un observateur spécialisé dans les questions d'environnement à New Delhi, le gouvernement indien pourrait proposer une "baisse de 20 % à 25 % de l'intensité carbone" à l'échéance 2020 (par rapport à 2005), contre 40 % à 45 % consentis par la Chine.
A Pékin, M. Ramesh a insisté sur le caractère "volontaire", "unilatéral" et "non contraignant" des engagements que prennent en ce moment les pays en voie de développement. En début de semaine, il avait même déclaré devant le Parlement que le refus de tout engagement contraignant à la baisse des émissions en termes absolus était "inscrit dans le roc". New Delhi affirme continuer à se battre pour que soit préservé l'esprit du sommet de Rio en 1992 puis du protocole de Kyoto en 1997, à savoir que les pays industrialisés doivent prendre les devants dans les réductions d'émissions et les transferts de technologies. Pour tenter de lever les réticences indiennes, M. Sarkozy a annoncé que l'Inde serait éligible aux aides proposées par la France dans le cadre du plan justice-climat. A cette occasion, il a proposé que les pays riches fournissent "un premier engagement financier" de 10 milliards de dollars (6,6 millions d'euros) par an, à partir de 2010, pour trois ans, aux plus vulnérables pour les aider à réduire leurs émissions de CO2.
A New Delhi et Trinité-et-Tobago
Frédéric Bobin et Arnaud Leparmentier
Le Monde
29.11.09
samedi 28 novembre 2009
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