***La taxe carbone a fait un retour inattendu dans l'arène européenne après des déclarations de Nicolas Sarkozy, le 26 mars, à Bruxelles, à l'issue du sommet des chefs d'Etat et de gouvernement.
Le dossier du changement climatique devait rester dans l'ombre du débat sur la situation financière de la Grèce mais les propos du président français ont relancé les questions sur la politique de l'Union européenne (UE), après l'échec de la conférence de Copenhague sur le climat en décembre 2009. Ils ont, surtout, créé la confusion.
Selon M. Sarkozy, le président de la Commission, José Manuel Barroso, aurait indiqué vouloir mettre sur la table, en juin, une proposition visant à taxer les importations de produits issus de pays qui traînent les pieds pour résoudre leurs émissions de CO2. Cette mesure fait partie du plan de lutte contre le changement climatique adopté en 2008 par l'UE. C'est aussi un instrument anti-dumping destiné à éviter des délocalisations venant d'industriels tentés d'aller produire dans des pays où ils pourraient polluer plus librement.
Prônant "la fin de la naïveté de l'Europe", M. Sarkozy a affirmé qu'aucun des Vingt-Sept ne s'opposait à une mesure "incontournable", même si, a-t-il concédé, elle serait difficile à mettre en oeuvre.
VITE EN BESOGNE
Il est allé un peu vite en besogne, apparaissant surtout soucieux de faire oublier l'abandon récent de la taxe carbone française. M. Barroso a été un peu pris au dépourvu. "On en discutera plus tard", s'est-il contenté de déclarer vendredi. L'un de ses porte-parole affirmait même que la question n'avait pas été vraiment débattue. Et, qu'en tout cas, elle ne semblait pas faire l'unanimité. Certains chefs d'Etat estimant, à l'instar du chancelier autrichien Werner Faymann, que "ce ne serait pas une bonne technique de négociation" vis-à-vis des pays en développement.
L'Italie et la Pologne semblent d'autant moins enclines à s'engager sur cette voie qu'elles seraient prêtes à renoncer à l'un des principaux objectifs des Vingt-Sept sur le climat : la réduction d'ici à 2020 de 30 % des émissions de gaz à effet de serre par rapport au niveau de 1990, à condition que les autres grands pays fassent de même.
Les affirmations de M. Sarkozy tranchent avec les objectifs prudents de la Commission. Bruxelles croit au mieux à un accord international d'ici à la fin 2011, et prône plutôt une politique des petits pas.
Il n'y aura donc pas de décision sur une taxe carbone aux frontières européennes en juin. En revanche, les mesures qui seraient nécessaires pour passer à 30 % de réduction d'émissions seront présentées. Ainsi qu'un rapport sur les "fuites carbone", c'est-à-dire l'analyse des risques de délocalisation et des effets sur l'industrie européenne d'un échec des négociations sur le climat. Quant au commissaire à la fiscalité, Algirdas Semeta, il étudie une taxe interne à l'UE. Elle viserait à harmoniser les règles de la fiscalité écologique au sein des Vingt-Sept.
Bruxelles Bureau européen
Jean-Pierre Stroobants
28.03.10
Le Monde
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